Le symbolisme de la maison de Saint Avertin

31 octobre 2009

Notre maison de Saint-Avertin a quasiment été un prototype puisqu’elle a été la première maison individuelle construite toute en chanvre en France (Europe ?) au XX° siècle.

Espace ouvert

Elle a été construite sur un espace ouvert, le terrain n’était pas délimité par un mur. Il avait une forme de trapèze. Sur sa base la plus large, tournée vers un verger, nous avions mis une barrière végétale faite de haie vive pour arrêter la pollution amenée par l’agriculteur voisin. Cette haie était plus dispersée sur la face rue et la face arrière qui longeait un petit chemin et il n’y en avait quasiment pas sur la base la plus petite. Cette dernière donnait en effet sur un terrain triangulaire public, municipal qui n’avait que quelques arbres. Cela donnait ainsi aux enfants un espace de jeu bien plus grand et ouvert.

Gardiens du seuil

La maison a été construite suivant des symboles et des métaphores traditionnels mais qui nous étaient propres en fonction de notre histoire.

On peut dire que compte tenu de l’espace ouvert (et du nombre impressionant de curieux venus voir cette maison et pour certains sans aucune retenue, aucun respect) nous avions symboliquement mis une protection, filtration extérieure, comme le gardien du seuil,dans toutes les traditions ésotériques occidentales va surveiller que chaque entrant venant du monde profane (hors temple) soit bien initié aux rites conduits à l’intérieur.

Arthur, le chêne

Le principal gardien était le chêne. C’est un chêne qui est sensiblement centenaire (au vu de la taille). C’est un arbre au double tronc, ce type d’arbre est traditionnellement reconnu comme « arbre guérisseur » , c’est à dire un arbre qui « arrête le mal », d’où l’effet de protection. Voilà ce qu’en dit Marie-Emilia Vannier dans son livre « L'Arbre Guérisseur » :

« ... Je suis deux frères jumeaux qui t'ouvrent une porte. Il faut saisir la chance de la franchir, car cette porte est très particulière. La passer c'est une opportunité qui t'est offerte de te débarrasser d'un problème ou d'un mal. Il suffit pour cela, que tu franchisses le seuil en passant entre nos deux troncs séparés en deux et que tu laisses mentalement derrière toi le mal en passant. Le mal ne franchira pas notre porte, je te le promets. Nous y veillerons. Passes et repasses ainsi 5 ou 6 fois tu verras comment c'est efficace. Si c'est ton petit enfant qui est malade. Il suffit de le prendre dans tes bras afin de passer avec lui, mais avec l'intention que les passes soient pour lui. »

Cette dualité symbolisait aussi les deux colonnes qu’on retrouve de part et d'autre de la porte de tout temple maçonnique, Elles se nomment Boaz et Jakin et portent en général sur elles, peintes, leur initiales, B et J. On retrouve leur origine dans la Bible (Rois 7,21) : « Il dressa donc les colonnes au porche du Temple, et mit l'une à main droite et la nomma Jakin; et il mit l'autre à main gauche, et la nomma Boaz. » comme colonnes du temple de Jérusalem ou Temple de Salomon . Salomon dont le sceau fait de deux triangles entrelacés est très important dans les mouvements ésotériques. Il est appelé aussi hexagramme (étoile à 6 branches qu’on retrouve sur le drapeau israélien). Depuis ce roi ce serait un puissant talisman conjurer les démons et invoquer les anges ! Mais on reverra à l’intérieur de la maison que toute cette symbolique protectrice prend plus le sens de l’union des contraires, des principes masculin et féminin.

Il est à notre concernant ce chêne que nous avions inventé une légende que nous racontions le soir à nos filles les plus jeunes, comme quoi le chevalier Arthur serait réincarné dans ce chêne et les protégerait ainsi de toute intrusion négative.

Par ailleurs nous avions regardé avec une maquette de notre maison que nous avions construite que le chêne nous protégeait de la chaleur du soleil en été qui est en hauteur, et quand l’automne venait et faisait tomber ses feuilles il pouvait laisser passer la lumière (plus proche de l’horizon) et la chaleur à travers la véranda. Il participait donc à une thermo-régulation de la maison.

Enfin le chêne, le « roi des arbres » était considéré comme un puissant élément de relations des énergies cosmo-telluriques, comme une antenne relai, on aura l’occasion d’en reparler un peu plus loin.

La croix templière

La croix qui était proche de la porte d’entrée, de même couleur que l’enduit pour rester malgré tout discrète, signalait un lieu tellurique « particulier », initiatique mariage de la matière, du quotidien, (branche horizontale) et de la spiritualité (branche verticale). Le point d'intersection des deux branches marquant l'unité, harmonieuse et naturelle, c’est là où dans la tradition s’épanouit le coeur de la vie, la vie, la rose (voir traditions Rose+Croix).

Passage du seuil

Après être passé sous les fourches caudines de Arthur, même le néophyte (nouvel initié) nous pouvions rentrer dans le temple.

Carrelages & passages

Mais nous avions alors à faire aux gardiens intérieurs qui tel le symbole taoïste du Yin Yang reproduisait les deux piliers extérieurs. Nous avions pour cela utilisé des carrelages à double argiles de couleurs différentes. Il faut savoir que ce symbole est souvent représenté en noir et blanc alors que dans la représentation taoïste traditionnelle, le yin et le yang portent ces deux couleurs : le yang est rouge et le yin est vert.

Nous avions mis deux carrelages représentant des croix blanches aux argiles de couleurs inversées.

Ce « passage » autour de la porte d’entrée se retrouve autour de tous les « passages » entre l’espace « ouvert au public » que sont le salon et la salle à manger et les espaces plus intimes comme la chambre du RDC ou l’escalier montant vers le domaine des enfants (voir plus loin).

Nous ne sommes donc plus tant dans une protection (faite à l’extérieur) mais à une aide à l’harmonisation comme la symbolique taoïste du yin yang qui unit les opposés ou le terme de la tradition zen : « shinjin ichinyo » : le corps et esprit sont un. Nous passons donc d’un monde dualiste extérieur à un monde de l’unité, de l’harmonie. (c’était en tout cas le voeux, que nous espérions pas simplement pieux, pour notre famille).

Un rappel (restons prudents ;) ) des gardiens du seuil sont ensuite représentés par deux chevaliers.

Toute cette symbolique, comme tout le côté « domobiologique » de la maison avait été vu en partenariat avec l’architecte du projet : Francis Aujames

Landmark

Traditionnellement pour bâtir un temple il faut d’abord en marquer son emplacement sur le sol, par des poteaux qui délimitent son emprise. Cela symbolise le cadre dans lequel peut se dérouler cette harmonie, chez les Francs-maçons ont parle « Un Maçon libre dans une Loge libre », c’est à dire que l’espace de liberté est délimité par des règles qui favorisent cette autonomie en préservant le respect de chacun,et ces règles sont déterminées par le groupe. Ces marques au sol sont appelées Landmark et ce nom sont aussi les règles de bon fonctionnement de la franc-maçonnerie (c’est la Règle des ordres monastiques).

Nous avons donc des carreaux par trois (comme les trois points par lesquels peuvent se reconnaître les frères maçons) dans les angles de la maison. Trois angles sont en fait ainsi marqués, tournés vers le foyer (que nous verrons plus loin) comme les trois triangles des éléments alchimiques face au feu transmutateur.

Ouvertures

Chaque fenêtre porte un rappel de la « double protection » par des carrelages symboliques représentants des fleur de lys (trident), doubles oiseaux ou lions.

Axis Mundi

Chaque poteau de la maison est constitué d’une manière contemporaine d’un double bastaings reliés régulièrement entre eux, le centre du poteau ne travaillant pas, il peut être creux. Néanmoins nous avions fait poser à l’entrée un poteau carré plein, sorte d’axis mundi qui servait de liaison entre la terre et le ciel, rappel du chêne (voir ci dessus) et de la symbolique verticale de la maison (voir ci après). Cet axe du monde, de notre monde, devait être sculpté d’une symbolique montrant l’énergie tellurique qui montait et l’énergie cosmique qui descendait, mais nous sommes partis trop tôt pour finir cela. Tout temple doit demeurer inachevé pour symboliser l’impermanence et la limitation de la vie matérielle.

Le poteau central reçoit l’appui de trois « fermes » de charpente, d’où son importance symbolique d’axe de la maison.

Trésor de l’Alchimiste

Dans le livre de Paulo Coelho : « L'ALCHIMISTE » Santiago le héros rêve d’un trésor aux pieds des pyramides, il vivra de nombreuses aventures avant d’y arriver, celles ci ayant pour but de mieux lui révéler qui il est. Mais au pied des pyramides, c’est un autre rêve qu’il rencontre : que son trésor est au pied de l’arbre où il se reposait en tant que berger, chez lui. Et de retour chez lui il peut trouve ce trésor. Nous oublions souvent nos trésors personnels pour courir le monde après des trésors virtuels inatteignables. « Aujourd’hui, quelque part, un trésor vous attend. Ce peut-être un petit sourire, ce peut être une grande conquête, peu importe. La vie est faite de petits et de grands miracles. Rien n’est ennuyeux, car tout change constamment. L’ennui n’est pas dans le monde, mais dans la manière dont nous voyons le monde. » – Paulo Coelho

Pour symboliser cela nous avons donc déposé en famille un trésor au pied du poteau, avant que ne soit coulée la dalle.

Foyer, doux foyer

La cheminée est une cheminée focus de Dominique Imbert . C’est le foyer, en tant que feu, mais aussi en tant que « centre » comme le foyer d’un cercle, c’est de ce coeur que rayonne l’esprit de la maison et la chaleur. l’acier de la sphère devait permettre de rayonner la chaleur pour chauffer la pièce principale et que la chaleur monte à l’étage, même si un chauffage central était complémentaire.

Vasques vives

Les vasques vives sont issues d’une autre belle rencontre, avec Michaël Monziès . Leur sculpture, leur forme particulières permettent de recréer les mouvements de l’eau dans les rivières qui se rapprochent du lemniscate, ainsi chaque corolle de la fontaine se remplit d’un côté pendant que l’autre se vide, et cela d’une manière inversée à chaque niveau, en regardant la fontaine nous avons donc l’impression de voir un coeur qui bat avec ses ventricules qui se remplissent et se vident. Ce mouvement créé symboliquement était un appel pour relier la maison et ses habitants aux énergies cosmo-telluriques du chêne. Nous avions donc un axe de symétrie qui allait du chêne à la cheminée en passant par le poteau central et les vasques vives, axe qui était porteur d’énergie, de l’eau de l’arbre au feu de la cheminée, comme un cordon ombilical qui nourrit le foetus.

Le Temple de l’Humain

Les temples et les maisons ont toujours été construites traditionnellement sur l’image de l’humain, tel qu’il se voit, du pays Dogon aux temples égyptiens, debout, en croix comme pour les églises, assis pour les temples orientaux. Ici nous avions choisi la symbolique du foetus symbolisant notre engagement dans la recherche sur l’enfance et son éducation. Nous étions à l’écoute de ce qui se faisait de plus naturel en lien avec l’accouchement, de Leboyer à Odent, des débuts de l’haptonomie amenée par This avant qu’elle ne se réponde aux massages Shantala ou aux sons.

Chaque partie de la maison et de son contexte s’y trouver comme métaphore : la maison en L était en position foetale, prête à grandir, à s’épanouir (peut être est ce pour cela qu’il a fallu qu’on parte ? Pour s’épanouir ? ;) )

Le placenta était le chêne, le cordon ombilical : les vasques vives, le coeur : la cheminée, la partie digestive : le coin cuisine et le coin repas, toute la partie basse du corps (sexualité, action) : la chambre (parentale) du RDC, la colonne vertébrale, le dos c’est le mur nord avec les bardeaux de bois.

Vue de face la maison était symboliquement un humain debout avec le RDC représentant les bases, les fondations, l’appui, c’est la zone parentale, l’étage étant tourné vers l’avenir, l’élan vers le ciel, c’est la zone des enfants.

Sceau du saint esprit

Le vitrail , fait par un maître vitrier de Tours, représente le « sceau du saint esprit », la colombe du saint esprit qui plonge dans le graal matériel, symbolique qu’on retrouver par le chêne comme on l’a vu mais aussi c’est la « plongée de l’âme dans la mémoire », le karma pour se réincarner. La colombe est en lien avec l'Oeil qui est au dessus, symbole divin, ou d'éveil (la Claire Vision bouddhiste). Elle était le lien entre le passé (rdc) et l’étage (futur). C’est aussi le graal, la quête de la chevalerie, la recherche de sa « légende personnelle » comme le dit Coelho, alors que le trésor est à ses pieds. C’est le Saint Graal qui aurait recueilli la coupe de la Cène qui ensuite aurait recueillie le sang du Christ du croix et ramené en Europe par Joseph d’Arimathie et dont les Templiers seraient les gardiens. Comme les parents sont les garants d’un cadre éducatif qui permet l’évolution et l’épanouissement des enfants. C’est aussi le symbole de l’Eveil bouddhiste dans une vision chrétienne, la colombe descend sur Jésus lors de son baptême par Jean-Baptiste (JB comme les colonnes voir au début). Quand dans la légende Parsifal saisit le Graal une colombe descend du ciel pour lui donner la bénédiction divine.

Chanvre

Les murs de la maison sont en pisé de chanvre avec de la chaux aérienne et la dalle en chanvre, chaux aérienne et chaux hydraulique. Les bois ont été traités à base de sels de cuivre et de produits Biofa. Les sols ont été cirés avec des produits Biofa. Le toit et la face nord sont en bardeaux de châtaigner, comme les maisons du Mont St Michel. Tous les points électriques sont sur télérupteurs, de façon le soir à pouvoir depuis le tableau central supprimer tout les courants alternatifs de la maison, seule restait l’alimentation du réfrigérateur qui était contre le mur du garage. Les cables électriques courent le long des murs pour ne pas avoir de courant électrique au milieu des pièces. Les isolations phoniques intérieures verticales et horizontales sont en chanvre.